Me murant dans un silence de plomb, je n’osais plus ouvrir la bouche de peur de rendre l’ambiance entre nous plus sombre. Moi d’ordinaire si joyeuse, je venais tout simplement de rendre mon compagnon malheureux en ne sachant lui apporter les réponses qu’il souhaitait. Sa tristesse se voyait comme le nez au milieu du visage mais je ne voulais pas en rajouter, je n’aurais fait qu’alourdir sa peine. Il essaya de me remonter le moral en affichant un sourire qui ressemblait plus à une grimace. Cela me fit du bien même si ne le montrais pas. Et apparemment, cela ne lui convenait pas et je détournais les yeux pour venir fixer le sol. Doucement, sans bruit, il s’approcha de moi et me força à relever la tête avant de poser ses index de par et d’autre de ma bouche, sans douleurs, obligeant mes lèvres à s’étirer dans un vague semblant de sourire. Ah je devais être belle comme ça !! Plongeant mon regard rubis dans le sien ambré, je crus déceler de l’amusement dans ses yeux. Se moquait-il de moi ou était-ce mon imagination ? Puis contre toute attente, je me mis à rire, d’une voix cristalline qui se réverbéra dans toute la grotte. Il avait réussi à me rendre ma bonne humeur en seulement deux minutes. Me calmant, je le remerciais d’un signe de tête accompagné d’un regard chaleureux et en profitais pour le scruter discrètement.
Des cheveux rougeoyants, retenus par son bandeau en guise de serre-tête pour empêcher des mèches folles de tomber devant ses yeux. Son regard, ambré tel de l’or fondu semblait nous happer dans un océan baigné de lumière. Je ne me sentais pas du tout en danger, au contraire, il avait ce je ne savais quoi qui me rassurait. Je me sentais bien et j’étais heureuse qu’il soit là avec moi. Toute seule, j’aurais surement paniqué et aurais mis du temps avant de me calmer mais, il était là. Perturbant mes pensées, il me demandait comment était la vie à Kiri. Je pris quelques secondes de réflexion et lui narrait ma simple vie de shinobi dans ce village.
Et bien.. Pour tout te dire, Kiri est vraiment un village magnifique. Si tu exclus la pluie qui est récurrente et l’humidité, il y fait bon vivre. Je suppose que tu imagines que c’est encore la période de la brume sanglante.
Je frissonnais lorsque je prononçais ces mots.
Cette période est révolue maintenant. La Godaime Mizukage à depuis longtemps révoquer cette époque de meurtres et ce n’est plus qu’une tâche sombre dans l’histoire de Kiri. Tu sais Meï Terumi est une femme absolument fabuleuse. Elle s’est battue, a mené la révolution contre Yagura, l’ancien Mizukage, avec l’aide du peuple et grâce à tous ces gens, le gouvernement fut renversé. Il n’est plus et ne sera plus jamais. J’en ai fais le serment, je me battrais s’il le faut contre le monde entier pour ne plus que ça arrive.
Puis je repensais à mes parents, morts pour cette révolution, pour l’avenir de Kiri qui maintenant rayonnait. J’étais tellement fière d’être leur fille. Je ne devais pas être triste, au contraire, je devais leur montrer que j’étais forte et que je me battais pour poursuivre leurs efforts, leur voie qu’ils avaient tracée en sacrifiant leur vie.
Il m’avait écouté jusqu’au bout, buvant mes paroles comme l’eau d’une fontaine. Je n’avais pourtant pas les qualités pour conter les récits mais j’avais su capter mon interlocuteur. Me proposant une pomme tout droit sortie de son sac, je croquais dedans sans méfiance. S’il avait voulu me tuer, il l’aurait fait depuis longtemps. Ce fruit était exquis. La douceur sucrée et acidulée me ravit les papilles et je la mangeais ne laissant pour cadavre, que le trognon. Tandis que je m’essuyais les lèvres, il me demanda si je m’étais déjà sentie impuissante dans une situation et si je culpabilisais. Je réfléchis.
Et bien, c’est récent mais en cet instant, je me sens impuissante face à notre situation. Je cherche un moyen de nous faire sortir mais malheureusement, je n’en vois aucun à l’heure actuelle. Je m’en veux surtout de t’avoir entrainé dans cette histoire qui ne te touchait en rien. Tu es prisonnier à cause de moi et j’en suis vraiment désolée. J’avoue que je n’ai connu pareille situation avant aujourd’hui. Pardonne-moi de ne pas savoir t’aider plus. Parfois je me sens vraiment inutile.
Je repartais dans mon silence, non sans lui avoir jeté un regard navré. Puis soupirant, je ne voulais plus que l’on se laisse abattre. Nous devions sortir d’ici et comme je venais de le dire, j’allais mettre tous mes neurones à contribution. Je restais malgré tout curieuse sur ce jeune homme des montagnes et lui posais la même question sur son village.
Et toi ? Comment est la vie à Kumo ? Je pensais que tous les Kumojins étaient un peu … rustres ! Ne le prends pas mal, au contraire, je trouve que tu es gentil et prévenant.
Je m’étais rattrapée tant bien que mal. Je ne voulais pas le vexer, mais dans nos contrées, nous étions plus du genre introverti bien que chaleureux. Hors les Kumojins avaient la particularité d’être assez extravertis, du moins ceux que j’avais déjà pu rencontrer lorsqu’ils venaient au port de Kiri. J’écoutais son récit sur les terres abruptes de son village. C’était fascinant, les différences entre nos deux contrées étaient tellement intéressantes. La flamme qui nous illuminait dansait au gré du vent qui se glissait par les petits interstices, projetant nos ombres sur la paroi de la grotte et faisant onduler nos silhouettes tels des fantômes. L’intimité qui se dégageait était apaisante, me rendant sereine et je me laissais emporter dans une sorte de bien-être. Puis, décidant de briser cet instant, je lui demandais d’une voix emplie de douceur.
Que feras-tu une fois sorti d’ici ?
J’avais chuchoté plus que parler, cette ambiance me plaisait tellement que je ne voulais plus en sortir. Je me sentais comme dans un monde différent, comme si le temps s’était arrêté ici. Il n’y avait plus que lui et moi, Dokkyo et Kôtora. Nous n’étions plus de villages différents, ennemis. Nous étions deux jeunes prisonniers du temps et de l’espace.