Tu n'étais clairement pas un membre normal du conseil. Ah ça non, et ne parlons même pas de ton véritable titre. En tant que Haut-Conseiller, tu devais présider ce fameux Conseil dès qu'il le fallait mais tes différentes actions et autre voyages montraient tout à fait le contraire. A vrai dire, tu étais plus souvent dans les autres villages et pays que dans celui auquel tu appartenais. Notons également que ton influence jouait grandement là-dessus. En tant que Shinobi le plus influent du Pays du Vent – et un des plus influents au monde – tu étais forcément amené à devoir bouger sans arrêt. Un véritable homme d'affaires ! Il y a quelques mois, tu t'étais retrouvé à Kumo pour une simple missive lorsque plusieurs événements te sont tombés dessus. Au final, tu en étais grandement ressorti gagnant puisque tu avais réussi à t'accorder les faveurs du Raikage ainsi qu'un lot de pouvoir au sein de son village... ce qui n'était pas du tout négligeable. Bien au contraire ! Après cette petite affaire politique, tu étais enfin revenu au village, histoire de te reposer un peu. Du moins, c'est ce que tu avais projeté de faire.

Gaara n'était pas de cet avis. En effet, tu fus rapidement convié dans ses bureaux afin qu'il puisse te donner une nouvelle mission. Haut Conseiller, certes. Supérieur au bras droit, certes. Plus influent et important que ton propre Kazekage, certes. Mais tu devais encore exécuter ses ordres, même s'ils incommodaient au possible. C'est ainsi que tu rendis rapidement dans ses bureaux, sourire aux lèvres, afin d'écouter ce que tu allais devoir faire.  Et comme d'habitude, tu acceptas avec une bonne humeur qui en trompait plus d'un.

La mission ? Il s'agissait simplement d'un cartel pour le moins... malsain, qui s'amusait à faire du trafic d'organes, d'être humains et plus particulièrement de femmes et d'enfants. Si encore il n'y avait « que » du trafic, tu aurais pu t'en accommoder. Mais il s'avère que ces raclures de fonds de tiroirs avaient comme hobby de faire tourner des films pornographiques à base de viol, torture et autres joyeusetés pédophiles. D'instinct, ta haine fut titillée et tu te promis à toi-même de tout faire pour les mettre hors d'état de nuire... Quitte à les tuer. La mort et la violence, voilà les rares moments durant les quels tu pouvais te défouler et faire ressortir toute la colère qui était en toi. Mais pourquoi éprouvais-tu donc cela à l'égard de ces misérables ? De nombreux et douloureux souvenirs avaient fait surface. Tu revoyais encore, ou du moins entendais à nouveau, ces nombreuses soirées où tu étais enfermé dans cette cave, par ton père, alors qu'il battait et violait ta mère, femme sur laquelle tu n'as jamais su poser un nom ou un visage. Tu te remémorais la fois où cet enfoiré vous avait kidnappé, toi et Aika, afin qu'il t'implante ce foutu cancer et qu'il la viole juste sous tes yeux... Tu l'avais empoisonné et paralysé en vie. Cela dit, tu ne savais pas s'il était encore vivant ou non... Un doute planait sur cette zone d'ombre de ton histoire. Et enfin, tu revoyais le corps de ta douce, meurtri et ensanglanté, sur sa chaise, dans sa chambre... Tu n'en pouvais plus. Tu y pensais à longueur de journée mais tu avais l'impression que l'on venait de te planter d'innombrables poignards dans le cœur.

Le regard grave, sérieux, tu t'étais mis en quête de vengeance et de rédemption, prêt à en découdre une bonne fois pour toute. Ton voyage dura quelques temps, considérablement, mais cela fut fructueux. Ton parcours était tout sauf indécis ou aléatoire, tu savais parfaitement où tees pas t'emmenaient... Vers les archipels du pays de l'eau, dans un petit village portuaire dont l'afflux commercial était impressionnant. Tu cherchais, tu cherchais... Mais impossible de réellement mettre la main dessus. Le groupuscule agissait dans la discrétion la plus totale, ici même. Tu le savais. Tu ne pouvais pas t'être trompé. Tu avais passé au crible le moindre repère potentiel de cet endroit et pourtant, il n'y avait rien. Tu décidais alors d'y aller au hasard, pour une fois et, au détour d'une ruelle... Tu te fis foncer dessus par une ombre furtive. Quelque peu surpris, tu rouvris les yeux et te rendis compte que ta tenue était rouge, par endroits. Cette odeur si familière... DU sang. Tu regardas un peu plus loin et te rendit compte qu'une jeune femme s'était étalée par terre. Voilà probablement ce qui m'était rentré dedans, t'étais-tu mis à penser. Tu te rendis vers elle et pus te rendre compte qu'elle état blessée au bras droit. L'entaille était typique et, en deux secondes même pas, tu avais pu savoir qu'un katana avait décidé de s'en prendre à elle.

「 Relevez-vous mademoiselle, vous n'avez pas de temps à perdre 」 dis-tu d'un ton grave en lui tendant la main.

Malheureusement, cinq barbares, armés de la tête aux pieds venaient de vous entourer. Tu entendis la jeunette jurer et c'est à cet instant que tu compris qu'elle aussi avat des ennuis. Un furtif coup d'oeil vers eux te permit de voir qu'il s'agissait de ceux que tu traquais depuis bien trop longtemps. La formation de base pour un tel combat se mit en place d'elle-même : dos à dos, vous tourniez sur vous-même afin d'avoir les yeux rivés sur ces dépravés. Un sourire carnassier s'afficha sur tes lèvres. Tu allais devoir être très prudent, tes pulsions commençaient à prendre le dessus.

「 Tiny... Mini... Miny... Mo ! 」 Chantonnas-tu d'une voix sadique tout en te léchant sensuellement les lèvres alors que ta main droite s'emparait du pommeau de ton katana. 「 Voyons voir qui va se faire souiller ce soir... 」

Dans quoi est-ce que tu t'étais entraîné encore ? Certes, tu avais réussi à trouver le cartel que tu devais démanteler. Cela dit, tu n'avais en rien prévu de devoir combattre à l'aide de quelqu'un d'autre, et encore moins d'une inconnue dont tu ne connaissais en rien les aptitudes au combat. Ce qui est fait est fait de toute façon. Tu ne pouvais plus vraiment faire machine arrière. Tu te concentras sur le combat alors que vous tourniez sur vous-mêmes, ne laissant aucun angle mort ; ils ne seront pas du tout à même de vous surprendre ou d'espérer attaquer par surprise. Vous étiez bien trop avisés pour cela. Main sur ton katana, tu étais prêt à dégainer à tout moment et tu ne manquerais pas une seule occasion de leur faire la peau. Ta langue lécha sadiquement tes lèvres tandis que tu décidais qui tu allais attaquer en premier. Cependant, les malfrats ne semblaient pas être d'accord.

Soit. Ils se décidèrent de lancer le premier assaut. L'espace de quelques instants, tu tentas de les sonder à l'aide de tes capacités sensorielles, ne pouvant voir ce qui était dans ton propre angle mort. Tu sentis un premier qui fondit sur la jeune femme. Celle-ci répliqua sans se laisser faire. Puis un deuxième vint en renfort. Déjà qu'ils avaient l'avantage, ils tentèrent de vous séparer. Ils n'étaient pas si idiots que cela, mais cela ne suffirait pas. Du moins, c'est ce que tu pensais. Ceux face à toi ne bougeaient toujours pas, comme s'ils attendaient une sorte de signal. Le deuxième assaillant, lui, avait décidé d'utiliser du Ninjutsu. A peine eus-tu senti son chakra se concentrer que tu pris appuis sur le dos de la Kunoichi pour t'en écarter au plus vite tout en tentant de la projeter au loin. Malheureusement, ce ne fut pas suffisant ; sa jambe se retrouva prise dans la déflagration et elle dût éteindre le feu qui se propageait à l'aide de sa cape, couchée à terre.

La noiraude se releva d'instinct et à partir de là, tu ne pus continuer de suivre le combat. La dernière action te fit perdre la concentration nécessaire pour utiliser ta sensorialité.

Tu te préoccupas donc du mastodonte qui te faisait face. Il semblait porter une sorte d'armure dont les cliquetis métalliques trahissaient sa présence à chaque pas qu'il entreprenait. Ton regard devint fou furieux et tu n'arrêtais pas de donner des coups e langues de plus en plus malsains. Tu avais totalement perdu le contrôle et tu ne t'en étais pas rendu compte. Pourquoi agissais-tu ainsi, personne ne le savait. Mais tu ne tarderais pas à le découvrir. Quoiqu'il en soit, tu le regardais s'approcher de toi, écartant les deux freluquets qui lui barraient la route. L'atteindre semblait difficile, mais pas irréalisable. Tu l'attendais, tu étais prêt à en découdre. Il te fallait néanmoins l'analyser afin de voir le point faible de son armure et de tenter une percée.

D'un geste éclair, tu dégainas ton arme et la pointas en direction du monstre. Ce dernier avait sorti, bien plus lentement, une arme gigantesque qui faisait pratiquement ta taille. M'enfin, il fallait également noter la taille de ce type. Il dépassait largement les deux mètres, et quant à son poids... Il était bien plus sûr de ne pas le savoir. D'une main, il braqua son arme sur toi et, tel le taureau en rut, gratta du pied et s'élança sur toi avec une vitesse et une force hors du commun. Quelque peu surpris, tu ne te laissas pas avoir et fis pénétrer ton chakra dans ta lame afin de la renforcer. Tu finis par prendre appui sur tes pieds, fortement ancrés dans le sol, et tu attendis que le géant abaisse son arme vers toi. Tu encaissas l'attaque, non sans en ressentir la force, et tentas de retourner l'attaque contre lui. Malheureusement, la force, le poids de l'arme et son armure prenaient de plus en plus de terrain. Tu allais devoir jouer de ton agilité et, habilement, tu t'extirpas de son emprise et tentas d'attaquer dans son angle mort. Ayant usé du Shunshin no jutsu, il ne pouvait te voir. Tu plantas alors ton épée en direction de son cœur et parvins à lui arracher un râle de douleur. Tu retiras ta lame couverte de sang lorsque, dans un souffle d'agonie, la montagne t'asséna un violent coup de poing qui te fait voler aux pieds de deux autres Nukenins.

Sur le dos, sonné, tu tentais de te relever. Mais c'était sans compter les deux mouflets qui t'en empêchaient et te ruaient de coups. Cela ne te faisait pas si mal que cela, mais tu étais irrité au plus haut point et tu allais leur faire payer. D'un mouvement du bassin, propulsé par tes jambes, tu les fis tomber à la renverse. Ce n'est qu'à ce moment là que tu pus constater qu'un des leurs était également mort, mais que ton alliée de fortune était également en très mauvais état. Tu te ruais à ses côtés et la portas par dessus ton épaule. Elle était légère, ce qui n'était pas plus mal. Bien sûr, il te fallait être plus rapide. Les deux boulets fusèrent vers vous, dans le but de finir le travail de leur camarade. Tu ne leur en laissas guère le temps ; tu sautas et, à l'aide de ton pied droit, pris appui sur le torse du premier. D'un geste gracieux sans équivoque, tu l'envoyas contre son acolyte et tu posas ton pied sur la tête du second. Tu pus ainsi t'élever encore plus dans les airs, sautant sur le toit le plus proche. Aussi vite que tu le pouvais, tu t'enfuyais avec le corps inerte, jetant de temps en temps un coup d'oeil autour de toi afin d'être sûr qu'ils ne vous suivaient pas.

Après quelques temps de courses, tu finis par sortir du village et trouvas une bonne cachette où tu pourrais lui attribuer les premiers soins. C'était là ton objectif principal, tu t'occuperais des deux restants une fois que tout ces problèmes seront réglés. Tu trouvas donc une petite montagne à l'intérieur de laquelle une grotte avait été forgée au fil du temps. Tu sondas l'endroit et te rendis compte qu'elle était bel et bien vide. Parfait. Vous montâtes à l'intérieur et tu la posas sur un lit de feuilles. Tu retiras la lame afin de voir l'étendue des dégâts. Heureusement pour elle, aucun organe ne semblait avoir été touché. Dans ton sac, tu cherchas de quoi éponger le sang ainsi que des bandages afin de panser la plaie. Après tout ce temps aux côtés de Hakase, tu avais appris à donner les premiers soins et cela te fut grandement utile. En règle générale, c'est toi qui avais besoin de secours à cause de ce mal profond qui te rongeait chaque jour un peu plus.

Une fois qu'elle fut soignée et que l'hémorragie fut stoppée, tu te rendis en contre bas et trempa une serviette dans le lac situé à proximité. Tout aussi rapidement, tu retournas voir la blessée et lui apposas la serviette sur le front avant de faire un petit feu de camp. Il ne faisait pas très chaud et, faible comme elle l'était actuellement, chopper un rhume n'était pas envisageable. Tu te rendis finalement à l'entrée de la grotte et sortis une cigarette de ton paquet, maintenant que tu avais repris tes sens. Tu la dégustas lorsque tu l'entendis bouger et maugréer. La voilà qui se réveillait. Tu te tournas vers elle et la regardas, ton sourire habituel aux lèvres.

「 Enfin vous vous réveillez 」 l'interpellas-tu en riant très légèrement. 「 Comment vous sentez-vous ? 」 Lui demandas-tu. 「 Oh et je m'appelle Kayaba Akihiko, enchanté 」 te présentas-tu enfin. Il était temps de faire les présentations après tout.

Les blessures au niveau de l'abdomen étaient souvent les plus graves et meurtrières. Il était toujours plus aisé de toucher un organe important en visant cet endroit précis. Tu en savais quelque chose, Akihiko. Oh que oui. Premièrement, tu ne pouvais oublier ce foutu cancer qui te rongeait de jour en jour. En effet, depuis que ton père vous avait kidnappés, toi et ta chère tendre, tu avais développé cette maladie. Tu avais réussi à apprivoiser la douleur et cela ne te faisait que rarement mal. Cependant, lorsque quelqu'un venait la toucher un peu trop violemment ou tentait même de s'y insérer, la douleur pouvait pratiquement te faire perdre connaissance. Il s'agissait, en réalité, de diamants noirs juxtaposés – ce qui te valut le surnom de Suna no Daiya, le Diamant de Suna auprès des Kusaribe – avec quelques disparités. Ainsi, tu pouvais résister à quelques coups de poings mais un coup de lame (ou même un projectile) bien placé et tu souffrais le martyr. Bien entendu, l'entité se défendait... à ton insu, déjà, et en puisant dans tes réserves vitales. Ce n'était clairement pas le bon deal, on est d'accord.

Ainsi, tu savais pertinemment ce que pouvait ressentir la jeune kunoichi. Elle qui était présentement blessée plus ou moins gravement, tu n'avais juste pas pu la laisser en plan. La question était légitime cependant ; pourquoi avais-tu décidé de la sauver ? Tu ne la connaissais ni d'Adam ni d'Eve, tu ne l'avais jamais rencontrée auparavant... Tu aurais très bien pu la laisser à la merci de ces rats. Bon, tu n'aurais pas pu tous les tuer, ils avaient l'avantage du nombre. De ce fait, tu savais que tu n'aurais pas pu tous le envoyer en Enfer, même si tu étais parti avec eux. Donc autant laisser un appât et revenir plus tard. Mais non. Le fait le plus étrange était que tu te décidas de l'aider malgré tes pulsions meurtrières et sanguines. Cette rage qui t'enveloppait avait malgré tout laisser passer une once d'humanité en ton cerveau détraqué et tu l'avais aidée. Une chose était sûre, cela dit, elle pourrait potentiellement t'être utile par la suite.

Comme dit, tu ne la connaissais pas du tout. Tu n'avais aucune fichue information à son sujet, que ça soit son nom, prénom, surnom, village... Rien. Le néant le plus total la concernant. Afin d'en savoir plus, tu t'étais décidé à te présenter, en ne déclinant que ton identité sans pour autant dire d'où tu venais. Village, poste... Rien de tout ça. Vu ta notoriété, elle te connaissait peut-être. Le cas échéant, tu pourrais peut-être en tirer avantage, qui sait. Bref, elle décida de se relever tandis que tu fumais tranquillement, l'esprit plus ou moins occupé. Cela ne te dérangeait pas, ces petits moments d'absences. Tu étais habitué et cela te permettait de t'y retrouver en ces périodes troubles. Et donc, il s'avéra que sa tentative fut vaine ; elle retomba brusquement sur les coudes et le dos, dans un fracas par très discret. Si elle voulait masquer son échec, c'en était également un.

La jeunette te rendit également un sourire, bien que forcé. Tu étais le mieux placé pour les distinguer ; cela faisait beaucoup trop longtemps que tu passes ton temps à mentir sur tes émotions et ce que tu montrais aux gens ; on ne te la faisait pas si facilement. Mais tu allais entrer dans son jeu. Oh que oui. Cela faisait quelques temps que tu ne t'étais pas amusé de la sorte et tu étais curieux de connaître et tester ses limites. Cela pourrait mener à quelque chose d'intéressant. Ainsi, tu t'étais rapproché d'elle pour au final t'accroupir devant son visage, les bras ballants. Une bataille de regards débuta et tu ne pus t'empêcher de repenser à Hakase. D'habitude c'était avec elle que tu faisais ces petits jeux ambigus. Pas avec une inconnue qui n'avait rien à lui envier, quoi que tu puisses en dire. Ta nouvelle interlocutrice, du nom de Wuzuki Emiko et originaire de Kiri, avait donc plongé son regard bleu azur dans le tien sans pour autant lâcher son sourire. Toi non plus tu n'avais pas effacé le tien. Il faut dire que c'était le masque que tu utilisais e plus, et celui qui passait dans quasiment toutes les situations. Elle ajouta, quelques instants après, que son ventre lui faisait mal. C'était logique, vu ce qu'elle venait de se prendre...


「 Je vous ai attribué les premiers soins, Emiko 」 lui expliquas-tu. 「 Cependant, je ne suis en rien un Ninja médecin. Par conséquent, il vous faudra en consulter un dès que vous en aurez l'occasion. Au moins, vos jours ne sont plus en danger 」 la rassuras-tu d'un sourire bienveillant.

Si Hakase s'était trouvée ici-même, l'hôpital n'aurait pas du tout été nécessaire. Malheureusement, il en avait été autrement. En effet, Gaara avait décidé que tu sois seul sur cette terrible mission ; seul toi, au sein du village, avais connu tant d'atrocités et tu étais l'unique Sunajin à pouvoir garder ton sang-froid face à de telles abominations. Tu avais également songé à ce que la Kusaribe vienne t'épauler, malheureusement... Elle aurait été bien trop sensible face à de tels actes et n'aurait jamais pu en ressortir indemne psychologiquement. Tu préférais cent fois devoir t'occuper, même précairement, des blessures de la Kirijin et de devoir l'envoyer à l'hôpital plutôt que de totalement la sauver ais de traumatiser Hakase. Et c'était tout à fait compréhensible. Tu tenais énormément à cette dernière et tu ne pouvais tout simplement pas lui infliger de telles souffrances.

Soudain, Emiko posa sa main sur la tienne et la prit entre les deux siennes, presque affectueusement. Cela te surprit et raviva de nombreux souvenirs que tu t’efforçais de garder enfouis, sans pour autant les oublier. Fatalement, tu repensas à ta douce Aika, celle qui avait partagé ta vie et avec qui tu devais te marier. Les larmes montaient peu à peu puis la faible voix de la blessée te sortit de ton état secondaire. Juste à temps. Tu déglutis discrètement, ravalant tes larmes, et te concentras sur ce qu'elle avait à te dire. Il s'agissait, d'ailleurs, plus de questions que d'affirmations, mais soit. Elle fit également battre ses cils avec une certaine élégance, le tout accompagné d'un petit sourire timide. Tu souris également, mais pas pour répondre au sien. Non, tu ne connaissais que trop bien cette tentative de séduction forcée. On voyait clairement que ce n'était pas vrai du tout et tu n'allais pas te manquer de lui faire comprendre, tout en entrant dans son jeu encore une fois. Tu pris ses deux mains dans les tiennes et les menas jusqu'à tes lèvres de manière à les effleurer. Puis tu te relevas subitement en riant avant de laisser ses mains retomber, doucement. Non, cela ne fonctionnerait clairement pas sur toi.

「 Pourquoi vous avoir sauvée ? Je me suis dit que j'aurais peut-être aimé que l'on me sauve dans un cas similaire, je pense. Dans tous les cas, sachez que votre petit jeu de séduction ne peut pas fonctionner sur ma personne. Je ne suis que trop bien placé pour détecter la malice et le jeu d'acteur, Emiko 」 lui dis-tu d'un ton neutre sans pour autant enlever ce sourire de tes lèvres. Il ne fallait tout de même pas qu'elle te croit froid à son encontre, tu n'avais rien à y gagner.

Mentir était naturel chez tout un chacun. Personne ne pouvait se vanter de n'avoir jamais agi de la sorte, surtout que les différentes situations sont plus ou moins légitimes. En effet, on peut très bien mentir pour se protéger, préserver quelqu'un, parmi les plus louables. Autrement, on peut se servir de cet outil afin d'arriver à ses fins, bien que celles-ci ne soient pas toujours de très bonne augure. Les hommes politiques, par exemple, mentent énormément afin d'arriver au pouvoir. D'autres s'en servent comme d'un moyen de pression ou encore pour accumuler un pactole non négligeable. Bref, les prétextes d'un mensonges sont innombrables et dépendent de la personne et du contexte. C'est pourquoi il est toujours dur de juger si une personne est en droit, ou non, de masquer la vérité. Cela dit, il n'était pas toujours aisé de déceler cette fourberie. Certaines personnes mentaient plus ou moins facilement – et naturellement – que d'autres. Même le plus innocent des hommes pouvait donc lire entre les lignes d'un mauvais menteur.

Tu savais ce que cela faisait que de toujours mentir, Akihiko. Après tout, ton jeu de masques était simplement un énorme mensonge qui s'étendait et était travaillé depuis de nombreuses années. Tu avais été forcé de masquer ce que tu ressentais aux yeux de ton père afin de ne pas en subir les conséquences, et voilà où tu en es actuellement ; tu commences à avoir de plus en plus de mal à déterminer quelles émotions sont actives à un moment précis et tu ne sais même plus les montrer aux autres, en règle générale. Cela pouvait être pratique dans le sens où, ainsi, tu ne dévoilais aucune faiblesse à ceux qui t'entourent, mais de l'autre... tu te demandais, au fond, si tu étais toujours humain, normal. Tu en doutais de plus en plus et, les quelques fois où tu mettais un nom sur cette chose qui grouillait au fond de ton être, tu n'arrivais à la ressentir que l'espace de quelques minutes. L'instant d'après, tu redevenais cet être froid, morne, neutre et impassible, avec ce sourire jovial, habituel, qui était faux au possible mais que personne n'avait encore été capable de percer à jour.

La Kirijin te sortit rapidement de tes pensées en poussant un soupire bel et bien audible. Ce type de soupire que tu connais bien, le bruit typique d'une chose qui t'avait agacé, intérieurement. Curieux, tu ne lui demandas pas directement ce qui pouvait la tracasser. Dans tous les cas, ça ne te regardait pas et, pour être honnête, tu n'en avais rien à faire du tout. Tu avais d'autres choses à gérer et elles étaient bien plus importantes que ce qui pouvait énerver ton interlocutrice. Tu savais qu'elle avait mal et tu l'avais sauvée. C'était déjà un bien grand investissement pour quelqu'un qui ne te serait d'aucune utilité ultérieurement. Bien sûr, tu aurais pu t'en débarrasse. Inconsciente durant plusieurs heures, l'égorger ou la planter aurait été d'une facilité déconcertante. Mais tu avais une fierté et un ego surdimensionné, ce qui t'empêchait de commettre ce genre de bassesses. Tu étais quelqu'un de digne, et ça personne ne pourrait l'oublier ou te l'enlever. Et c'est cette même dignité qui te rendait on, bienveillant. Par moments, bien sûr. Pas tout le temps, bien loin de là. Encore moins avec des inconnus.

Finalement, la jeune femme se redressa, sous tes yeux, alors que tu venais tout juste de relâcher ses mains de manipulatrice – chose qui ne fonctionnait pas sur toi comme elle avait pu s'en rendre compte – puis tu te relevas à ton tour. Rester accroupi pendant un certain temps pouvait vite être désagréable et tu n'avais pas spécialement envie d'atteindre cette phase. Bref, du sang coula de sa bouche ; elle devait pourtant se douter qu'il fallait éviter les efforts inutiles, surtout dans cette position d'infériorité, mais non. Elle continuait quand même de se redresser et donc de faire bouger sa plaie qui risquait de s'ouvrir encore un peu plus à tout moment. Elle semblait néanmoins avoir sa petite fierté bien à elle et ses paroles confirmèrent tes doutes.

De prime abord, elle sembla s'excuser pour sa facétieuse tentative de te séduire. Pourquoi pas. Mais cela ne t'empêchait pas de rester quelque peu sceptique. En effet, n'importe qui tentant quelque chose de la sorte, même après s'être fait recaler, persistait quand même ne serait-ce qu'un minimum. Mais pas elle. Ce revirement brutal d'objectif, d'entreprise et de but te força à te montrer davantage méfiant. Après tout, tu ne la connaissais pas et tu ne savais pas non plus de quoi elle pouvait être capable. De plus, une personne de sa trempe n'aurait jamais admis être vulnérable et inférieure à toi, ni même à quelqu'un d'autre. Tu ne saisissais pas spécialement le but de cette manœuvre, mais soit. Tu allais chercher à en savoir plus. C'était plus fort que toi, surtout que tu savais très bien que quelque chose clochait. Pour mener ton enquête, e mieux était de rentrer dans son jeu et c'est ce que tu allais faire sans te gêner ni même éprouver le moindre remord. Ah ça non, clairement pas. Tu en avais suffisamment éprouvé et ce, à plusieurs reprises, en vain. Tu savais à quel point il était inutile de s'apitoyer sur son sort. La vie était courte alors il fallait en profiter autant que possible. Tu t'éloignas de quelques mètres de la blessée et tu sortis une nouvelle cigarette que tu t'empressas d'allumer.

「 Ecoutez, Emiko. Je ne vous connais pas et pourtant, je peux aisément deviner que vous n'êtes pas celle que vous prétendez être. Vous êtes bien trop fière pour admettre votre vulnérabilité et utiliser ce prétexte à plusieurs reprises. J'imagine que votre ego vient d'en prendre un sacré coup et cela doit vous faire mal, intérieurement. Peut-être même bien plus que cette hémorragie. Alors pourquoi continuez-vous de vous inventer auprès de moi ? Pourquoi ne pas agir comme d'habitude ? 」 La questionnas-tu sans attendre de réponse. 「 Sinon, pour répondre à vos questions... Non, même en tant que femme, je n'aurais jamais usé de mes charmes ou autres pour me faire sauver. Tout ce que j'aurais fait aurait été de suivre mes convictions et d'agir comme à l'habitude. Vous savez que je ne suis pas dangereux, du moins vous n'avez rien fait qui mérite que je le sois avec vous. Alors pourquoi tenter de me séduire ? Là réside la véritable question. Mais ne vous inquiétez pas, lorsque vous aurez repris suffisamment de forces, je vous amènerais à Kiri afin que vous puissiez avoir les soins nécessaires 」 terminas-tu en souriant comme tout à l'heure, tirant une taffe sur ta cigarette.

S'il y avait bien une chose que tu détestais plus que tout au monde – ou presque – c'était que tout te soit livré sur un plateau d'argent. Joueur et taquin, tu aimais les challenges et la difficulté. Le fait que la Kirijin s'offre ainsi à toi alors que tu n'avais rien voulu de sa part t'avait en quelque sorte irrité. Bien sûr, tu ne lui en voulais pas ; elle n'y était pour rien ; mais tu restais tout de même un peu agacé, au fond de toi. Encore une fois, tu ne montrais rien et continuais d'afficher ton sourire charmeur. Ce petit réflexe, ou du moins cette habituelle mécanique, finirait par te tuer un jour, tu le savais. Ou au moins t'attirer de très gros soucis. Mais pour l'instant, tu ne t'en préoccupais pas. En réalité, quelque chose t'intriguait un peu plus. Tu venais tout juste de te rendre compte que tu ne te souvenais plus de tous les détails concernant ta récente altercation avec le groupuscule que tu voulais plus que tout démanteler. Qu'avait-il bien pu se passer. Tu fermes vivement les yeux et tentas de te concentrer mais seuls quelques flashs vinrent. Rien de plus. Tu vis deux corps inertes, à terre ainsi que du sang sur tes mains.

Une effroyable douleur se réveilla en ton abdomen. Cette abomination bougeait. Ce n'était pas anormal en soit, mais à ce point ? Quelque chose clochait. Ça te faisait mal, très mal. Un rictus se forma sur ton visage mais tu repris bien vite ton faciès angélique. En de telles conditions, il était compliqué pour toi de jeter un œil à ce qui pouvait se tramer sous tes habits et bandages. Faisant fi de la douleur, tu rouvris les yeux lorsqu'une vois résonna dans ta tête. « Tue-la » qu'elle disait. Pourquoi t'étais-tu alors demandé. Cette obscure sensation te tourmentait alors. Ce n'était pas la première fois qu'un tel phénomène arrivait mais tu restais malgré tout surpris. Surtout que cela faisait des mois qu'elle n'était pas survenue... De minis appendices se mirent à tenter de percer les bandages mais leur force n'était pas encore suffisante. Voilà qui te rassurait. Intérieurement, tu lui ordonnas de se taire et tu plaquas tes mains sur ledit abdomen pour calmer ce qui t'habitait. Une fois chose faite, tu retiras tes mains de leur emplacement et tiras une nouvelle taffe.

C'était inquiétant et il ne fallait surtout pas que ton interlocutrice se pose des questions. Bien sûr, tu lui aurais dit que ce n'était rien, de simples maux de ventre, mais cela ne serait sûrement pas passé. Tu aurais dû te rabattre sur un excuse plus probante mais tu n'avais pas le temps d'y songer. Un parfait mensonge se façonnait durant quelques temps, non pas une maigre poignée de secondes. Fatalement, tu étais dans la fâcheuse position numéro deux. Tu allais devoir improviser si cela venait à empirer bien que, pour l'instant, tout semblait sous contrôle. Ta main droite était également engourdie et des pincements se faisaient ressentir sur ton avant bras. Caché par ta veste noire, tu ne pouvais savoir qu'une armée de diamants noirs tentait de prendre le contrôle de cette main. Tu serras alors ton poignet et grattas discrètement ce qui te démangeait. Tu terminas ce qu'il restait de la cigarette en une latte et jetas le mégot au loin alors que la jeune femme aux cheveux blancs tentait de s'appuyer tant bien que mal contre le mur.

Bref, tu attendais une réponse. Celle qui t'en devait une fit mie de réfléchir quelques courtes secondes et rit spontanément. Ce changement de tempérament aurait pu en déstabiliser plus d'un mais toi, tu n'étais pas spécialement surpris. Après tout, tu ne connaissais pas cette étrange Kunoichi donc toute situation pouvait très bien se passer. De plus, ta capacité d'adaptation te permettait de ne jamais être surpris et, en tant que ninja, c'était un point fort à ne pas négliger. Elle finit donc par te répondre mais affirma ne pas être fière et qu'il s'agissait là de quelque chose qui n'avait aucune importance à ses yeux. Voilà qui était bizarre – mais que tu ne relevas pas – puisqu'elle semblait être tout le contraire. La blanchâtre renchérit et expliqua le but de sa tentative de séduction pour au final ajouter qu'elle admirait ta perspicacité et qu'elle la respectait par la même occasion. Suite à ça, elle mit de nouveau le fait que tu l'avais sauvée sur le tapis pour ensuite demander sans attendre de réponse ce qu'elle pourrait bien avoir à cacher. Forcément, tu n'en savais trop rien mais tu savais pertinemment qu'elle aussi avait ses petites cachotteries à ne pas dévoiler au grand jour. Cela restait humain, après tout.

「 Voilà qui expliquerait tout. Ne trouvez-vous pas, cependant, qu'agir de la sorte en mettant principalement votre soi-disant charme en valeur donne une image dégradante de vous ? Bien que vous semblez probablement n'en avoir rien à faire, je pense que séduire un faible d'esprit peut se faire tout en restant digne, évitant ainsi de vous abaisser au niveau de tous ces singes incapables de penser avec autre chose que leur libido 」 lui répondis-tu dans un premier tout en continuant de la vouvoyer malgré sa soudaine prise de liberté. 「 Comme vous l'avez déjà remarqué, je vois très clair à travers votre petit jeu et je suis satisfait que vous vous soyez enfin décidée à jouer carte sur notre table, d'autant que, comme souligné, vous ne seriez probablement plus de ce monde sans mon illustre personne 」 ajoutas-tu sur un ton qui se voulait moqueur. Soudain, sans que tu puisses t'en rendre compte, ton expression faciale changea du tout au tout et ton regard devint carnassier, le bout de ta langue chatouillant alors tes lèvres. 「 Ce que vous pourriez avoir à cacher ? Bien des choses, j'imagine... Vous êtes une Kunoichi après tout. N'oublions pas que nous avons tous nos petits secrets et que nous ne voulons pas forcément qu'il soit dévoilé aux yeux de tous... Je suis persuadé que vous avez un sacré lot de secrets... Qui seraient intéressants à découvrir 」 terminas-tu de ta voix pernicieuse tandis que ton inconscient prenait le contrôle.