En retard.
Et m'y revoilà, à courir comme une dératée, en soulevant des nuages de poussière, dans les petites ruelles de notre joli village en direction de l'académie. Il doit y avoir un lemme dans l'univers qui implique que lorsqu'il vous arrive quelque chose de négatif... une suite incongrue de choses négatives et chiantes vous tombe dessus ! Et c'était vraisemblablement le cas en cet instant précis. Je n'avais pas entendu mon réveil comme à l'accoutumer. Pour tout vous dire, il avait traversé ma chambre en se fracassant contre le mur dès la première sonnerie et par conséquent, j'oubliais de me lever. Qu'il repose en paix, lui et ses petits débris de ferrailles bien agaçants qui ont pris un malin plaisir à s'enfoncer dans mes pieds ! Pour couronner le tout, beaucoup de villageois étaient de sortie et bien des obstacles de diverses formes, âge, textures ou ce que vous voulez, se sont dressés contre moi pour ralentir ma course à la montre. Tout cela pour dire que, grâce à cette histoire bien stupide, je suis totalement à la bourre !
Non monsieur, pas le temps pour un takoyaki et en plus, c'est pas l'heure ! Désolée madame, mais votre derrière obstrue le passage ! Oh l'gamin, ! Va donc jouer avec tes shurikens en carton ailleurs ! Même le clébard s'y met ?! Oh mais qu'avez-vous tous aujourd'hui bordel !!??
J'escaladai les murs avec brio, cherchant les meilleurs raccourcis pour arriver à mon but. Un dérapage et j'esquivais de peu un homme costaud portant plusieurs caisses empilées. Une glissade par-ci, un saut par là et je me retrouve sur une toiture, évitant ainsi une grosse cargaison de marchandise qui était à l'origine d'un embouteillage dans une ruelle. Jamais mon entraînement intensif ne m'avait autant servi en si peu de temps ! Je relevais la tête, cherchant une horloge des yeux : il me restait 10 minutes.
Donc, après ce tumultueux et tant éprouvant parcours du combattant que seul l'usage de sauts et pirouettes diverses et variées peuvent surmonter, j'arrivai enfin à l'académie. Pourquoi suis-je donc si pressée ? Me diriez vous. Je vous répondrai simplement qu'aujourd'hui est un jour spécial. Ce genre de moment digne d'être fêté et qui ne vous laisse jamais indifférent. Ces mêmes moments où vous vous dites que votre vie sera bouleversée à tout jamais ! C'est le jour où l'on nous répartit en groupe de trois en tant que genin. Oui, LE groupe. Celui dans lequel vous resterez un bon bout de temps afin d'accomplir moult missions, aventures et bien d'autres péripéties aux dangers extrêmes, qui vous prend par les tripes et qui vous forge jusqu'à l'os ! ! Je me voyais déjà affronter la crème des ninjas avec des coéquipiers au moins aussi puissants que moi et ramener les plus grands criminels classés dans le Bingo Book par la peau des fesses destination la case prison ! Mon excitation ne cessait de croître suivie de près par mon adrénaline digne d'un sportif dopé ! J'accélérais en imaginant tout ce qui pourrait suivre maintenant que j'avais enfoncé la porte qui menait au monde des Shinobis.
Ma vision de la réalité se trouvait fort erronée tant j'étais prise dans mes délires et perdue dans mes fantasmes. Si bien que, dans la continuité de malchance absolue du jour, je me pris les pieds dans un tapis légèrement ondulé qui me fit trébucher dans le couloir humide et par conséquent extrêmement glissant — parce qu'on avait décidé de passer un coup de serpillère à ce moment précis bien évidemment ! J'étais blasée et laissai même le destin se dérouler tranquillement s'il veut tant m'embarrasser. J'en avais assez de jouer avec lui pour aujourd'hui ! C'est avec un sourire à l'envers que je me stabilisais en surfant sur le plancher (ou plutôt en imitant allègrement et avec élégance la danse d'un canard peu flatteur). A celà s'ajoutait...
Oh non, vraiment ? Mais je suis où là, dans un cartoon tout pourri !!??
... des billes. Oui, des billes, sorties de nulle part, comme dans ces dessins animés sans queue ni tête, éparpillées sur le sol qui, pourtant, devait être lavé. Cette fois-ci, je glissais vraiment, secouant mes bras de haut en bas. Ma course se termina au moment où je me percutais avec quelque chose, ou quelqu'un. Tout ce que je savais, c'est que je m'y suis agrippée par simple réflexe et que je l'avais entraîné dans ma chute prodigieusement spectaculaire. Je me fracassais la figure contre le sol et resta là, en étoile, immobile et exténuée. Une petite flaque de sang se forma au sol. Je grognais bruyamment en pensant soupirer : j'étais blessée. Ce n'était pas gagné aujourd'hui et je sentais bien que ce n'était que le début d'une journée formidablement emmerdante!
PS: Merci saleté de malchance d'être devenue ma meilleure amie en ce jour si précieux. Amicalement, Rei...
