Ces murs, ce sol, ils en avaient vécu des choses, des personnes hors du commun. Le palais du Tsuchikage était une merveille architecturale, construit à l’époque d’or du village, les bases avaient été conservées toutes ses années et les quelques modifications n’enlevaient rien à la prestance de ce lieu. Quand je réfléchis, j’ai des frissons à parcourir ses longs couloirs, dire que l’illustre Mû, l’homme invisible avait été l’un des plus grands chefs de cet endroit. Assez rêvassé, je n’étais pas venu dans cet immeuble par nostalgie ou soif de connaissances mais pour recevoir une mission. Cela faisait quelques jours que je n’avais pas demandé d’acte à notre chef et pour cause, je ne recevais que des missions basiques et je dirais même, dégradante. Je sais que l’on ne peut pas parler comme cela et que le magnifique métier de ninja est un périple qui comporte plusieurs échelons. Cette fois-ci, j’étais venu dans l’espoir de remplir une mission distrayante et puis, je n’avais plus vraiment le choix, j’avais l’imminent besoin de me racheter quelques accessoires à la boutique d'arme.
Après un court passage chez le grand Ônoki, fier disciple de l’homme invisible, connu pour avoir survécu à un combat contre Uchiha Madara. J’ai très peu entendu parler de cet homme mais d’après certains dire, ce n’était pas loin d’être le plus puissant shinobi de l’histoire. Quand vous venez d’Iwagakure no Satõ, vous ne pouvez ignorer la puissance et l’aura que propageait Mû. Alors quand vous apprenez qu’il s’était fait balayer à deux contre un par ce ninja d’un autre niveau, je peux vous certifier que vous devez commencer à vous poser des questions. Enfin, revenons à nos moutons, une fois sortis de son bureau, un grand soulagement m’envahit. Je venais de recevoir une mission qui s’annonçait excitante. Traquer et anéantir un ours sévissant à l’arrière du village, ses sorties incessantes au niveau des plantations de certains villageois devenait plus qu’agaçantes surtout depuis que cet animal s’en était pris aux élevages d’un agriculteur.

Je voulais directement me rendre sur place afin d’accomplir ma mission mais une force terrifiante m’en empêchait, comme un vide me rongeant les sens et l’esprit. J’avais donc décidé de faire une escale dans mon humble demeure pour corriger ce manque en engloutissant deux bons bols de ramen. C’était des sachets instantanés mais tellement délicieux, rien comparé aux nouilles fraîches d’un bon restaurant mais quand le temps presse, c’est un délice. Une fois ma vaisselle terminée, je me rendis dans ma chambre afin de me changer et également de prendre une douche. Après tout, je revenais d’un jogging.
Enfin paré pour l’aventure, je me dirigeais vers l’arrière du village, où la bête avait été vue pour la dernière fois. Il fallait bien commencer son enquête quelque part, d’après le rapport de mission, la bête avait coutume d’airée derrière la cascade. Cela étant, ma curiosité me titillait, je voulais savoir à quel genre de bestiole j’avais affaire !

Après une bonne dizaine de minutes de marche, j’arrivai chez cet agriculteur qui me reçut dans sa maison avec un plaisir qu’il ne pouvait dissimuler. L’homme en question avait les mains raides et abîmées par le travail et son visage le faisait paraître dix ans plus vieux, cela étant, il ne s’empressa de m’offrir une boisson que je n’avais pas demandée. Je ne pouvais rien faire d’autre que de la prendre avec le sourire. L’agriculteur passa une bonne dizaine de minutes, qui m’en parut trente, à me conter ses déboires avec ce fameux animal qu’il décrivait comme énorme avec des dents pointues et assoiffées de sangs. De toute évidence, il était effrayé par cet ours et voulait à tout prix que je mette fin à ses agissements.

« Calmez-vous, montrez-moi l’endroit qu’il a saccagé. Ça m’aiderait à en savoir plus sur cet animal, une fois que j’aurais ces informations, je partirais à sa recherche et je ne m’arrêterai pas avant qu’il soit hors d’état de nuire. » Disais-je avec calme, histoire de rassurer le villageois.

« Oui… Vous avez raison. J...... Je dois aller nourrir les poules, c’est derrière la grange, vous pouvez pas rater ses dégâts. » Répondit-il en balbutiant.

J’avais hâte de m’éloigner de cet homme et de sa boisson infecte, je prétextai un étranglement pour déposer le verre plein devant moi et je pris la route vers la grange. Sur le chemin, je me raclai la gorge plusieurs fois et je crachai par terre ma salive afin d’évacuer le goût de chaussette que j’avais dans la bouche. En voyant les dégâts commis par cette bête, je n’avais pas pu retenir mon souffle, du sang gisait sur la pelouse à côté de trois chèvres dépecées. Les enclos étaient éventrés et la paroi de la grange avait subi des coups de griffes, cet animal n’était pas un ours ordinaire. Un grizzly des montagnes, l’un des plus gros mammifères que l’on pouvait croiser, faisait un maximum d’un mètre trente au garrot. Celui-ci était de toute évidence, plus grand et plus massif. Je devais en parler à quelqu’un, ça m’aide à réfléchir, je croquai le bout de mon pouce avant de faire quelques signes shinobi.

« Kuchiyose no jutsu ! »

« Yosh, Yosh’ … » s’interrompit là féline avant de reprendre. « C’est quoi ce bazar ! C’est répugnant, beurk ! Yosh’, t’es complètement fou de m’invoquer ici, je viens juste de faire ma toilette en plus ! » Dit la voix fluette de Kinha.

« Haha, ça surprend, hein ! Pourquoi « beurk » ? Tu es un lynx, je te rappelle… Tu es censée être carnivore et faire autant de dégâts que ça. » Repris-je avec ironie.

Une fois la fumée dissipée, un petit lynx, d’une fourrure mauve, apparut. Elle avait l’air écœurée par le spectacle, son avis était important pour moi. Kinha n’était pas un simple lynx, c’était avant tout un ninja. Elle excellait dans le domaine de la sensorialité, son odorat, sa vue, son ouïe était plus qu’important pour retrouver l’ours mais également pour comprendre son comportement. Un ours n’est pas foncièrement méchant, il ne tue pas pour le plaisir. Cet animal a dû avoir un souci ou une maladie, il était urgent de le retrouver car après des chèvres, il pourrait s’attaquer à des humains et en voyant la force destructrice qu’il possède, il pourrait faire d'énormes dégâts.

To be continued...

Après avoir analysé la scène avec attention, Kinha, à contrecœur, renifla les coups de griffes ainsi que les cadavres des chèvres. Nous étions parés à retrouver cette bête, cette mission devait s’annoncer comme simple mais cet animal allait peut-être nous causer des soucis. De toute façon, je n’avais aucune envie de reculer, me faire défigurer par un ours pouvait paraître horrible mais ce n’était rien comparé à la honte que je pourrais ressentir si je revienais sans avoir accompli une mission de ce rang. Kinha et moi, nous nous rendions du côté de la cascade, nous connaissions bien cet endroit. Derrière la chute d’eau, il y avait une grotte, j’avais déjà fait le tour de celle-ci sans trouver de trace d’un ours. Cependant, elle était humide, à proximité d’une source d’eau, l’habitation parfaite pour un animal de cette ampleur. Nous avancions dans la pénombre de la grotte, faisant attention à ne pas faire trop de bruit.

« Yosh’, je ne peux rien entendre ici. La grotte est une caisse de résonance et avec la chute d’eau, mon ouïe ne servira à rien ici. Par contre, je sens une odeur immonde de bête mouillée, il était ou est encore ici. En tout cas, on est à la bonne adresse… » Dit la petite féline avec sérieux.

En guise de réponse, je lui adressai un sourire reconnaissant, il était vrai que cette chute d’eau pouvait paraître handicapante mais ce bruit infernal était tout aussi présent pour nous que pour l’animal en question. On s’avançait prudemment vers le fond de la grotte, ma visibilité était quasiment nulle. Cependant, grâce à ses origines de félins, Kinha pouvait très bien voir dans la pénombre et je lui faisais assez confiance pour me guider. Après quelques mètres, ma fidèle alliée, qui s’était posée sur mon épaule, me l'a tapota pour me signaler de m’arrêter. L’odeur de poil mouillé et de sang séché se frayait maintenant un chemin dans mes narines, c’est vrai qu’elle puait cette bestiole. Kinha me susurra à l’oreille de me cacher car elle sentait l’odeur se rapprocher de plus en plus, mais dans un tunnel, il n’y a pas beaucoup d’endroits pour rester discret. Heureusement, j’avais plus d’un tour dans mon sac. Une subtile concentration suivit de quelques signes ninjas.

« Doton - Iwa Gakure » Chuchotais-je.

Mon corps se dissimula alors dans la roche, j'étais devenu invisible, inodore, en tout cas, pour cet ours. En effet, un ninja sensoriel pourrait sans aucun doute me repérer bien que je maitrise assez bien ce jutsu. C’est alors que l’ours fit son apparition, grand, costaud mais ce qui me choqua le plus, c’était sa fourrure. Elle était couverte de sang, de griffure, de peau morte, je savais que ce genre de blessure ne pouvait être réalisé que par ses soins. Il se lacérait, cette bête devait souffrir le martyre pour en arriver à de telles extrémités. Sa folie avait dû l’emmener au point de non-retour, il était impossible de le résonner ou en tout cas, extrêmement risqué. Alors que je me posais cette question dans ma tête : « Dois-je l’assommer ou le tuer ? », je ne m’étais pas rendu compte que Kinha avait quitté mes épaules. L’ours se mit à grogner dans ma direction mais il ne pouvait me voir, c’était impossible. Il se mit à charger et il me propulsa à un mètre de lui. C'est alors qu'il s’arrêta net et dubitatif, il regarda autour de lui avant de retourner son regard vers le lynx. J’avais effectivement vu juste, l’ours enragé ne m’avait pas vu, il avait senti l’odeur de Kinha. La bête affamée se mit à hurler en levant sa patte sanglante, prêt à éventrer ma plus vieille amie.

« Yosh’ ?! Au-secours ! » Cria-t-elle avec force.

« Doton - Doryû Taïga no Jutsu » criais-je de justesse.

Il s’en était fallu de peu, une forte coulée de boue emporta l’ours vers le fond du tunnel et Kinha en profita pour me rejoindre. Toujours invisible, j'entendis l’ours grogner, il avait la ferme intention de revenir à la charge. Cette technique ne faisait pas beaucoup de dégâts, elle servait, premièrement à éloigner l’adversaire mais elle pouvait aussi servir de combinaison. Il fallait que je trouve un plan, Kinha n’était pas faite pour le combat, elle était même très faible dans ce domaine. Je pouvais faire appel à ses frères mais j’avais déjà utilisé beaucoup de chakra et invoquer deux créatures de rang B allaient être mon dernier coup. Je ne voulais pas m’en remettre à un tel sort, certes, Ko’ et Ka' ne m’avaient jamais déçu mais j’avais une autre idée. Après tout, j’avais devant moi, un animal. Je joignis mes mains afin d’utiliser la technique de clonage par la boue, ce jutsu était un véritable passe-partout. C’est alors que deux clones se formèrent à partir de terre et de boue, l’ours commençait à se rapprocher, il fallait faire vite. Je décidai d'annuler ma première technique, bien que très peu coûteuse en chakra, je n’en avais plus besoin pour le moment. L’ours avait enfin remonté le tunnel et me faisait face, un contre un, enfin, face à un clone de boue. Pour ma part, je m’étais caché dans le sol en compagnie de mon deuxième clone, je n’avais pas eu le temps de partager mon plan avec Kinha qui me voyait dès à présent devant l’ours qui se mit à foncer sur mon clone.

« Yosh’, écartes-toi ! » Cria la féline de toutes ses forces.

« Doton - Shinjū Zanshu »

L’ours agrippa mon clone et il essaya de le mordre dans une fureur hors du commun mais le clone explosa en particules de boue. C’est alors que quatre mains sortirent du sol pour agripper les pattes arrière de l’ours qui s’était mis sur ses deux pattes afin de passer à l’attaque. La technique était simple, mon clone et moi-même attrapons les pattes de l’ours afin de l'enterré vivant et ne laisser que sa tête apparente.

« Tu es complètement inconscient ! J’ai eu la peur de ma vie, foutu gamin ! Qu’est-ce que j’aurais fait si tu avais été tué ! » Hurla Kinha, ses paroles emplies de colère et de peur.

« Excuse-moi Kinha… Je n’ai pas vraiment eu le temps de te mettre au parfum. Quoi qu’il en soit, il ne sait plus bouger pour le moment. Regarde-le, il est encore en fureur, je ne pense pas que l’on puisse le laisser en vie. Je ne suis pas vraiment fan de cela mais dans sa position, je n’ai pas le choix, je vais devoir le décapiter… Je vais faire de mon mieux pour qu’il ne sente rien. »

La féline, décidant qu’elle avait vu assez d’horreurs pour la journée, décida de s’en aller dans un nuage de fumée. La main ferme, j’agrippai mon Kodachi, ce que je devais faire bouleversaient mes fondamentaux. Je ne prenais aucun plaisir à enlever la vie d’un animal, je dirais même que, je préférerais enlever la vie d’un homme qui le mérite. Soit, je devais faire mon travail, ironiquement, je me dis que sa tête pourrait faire office de trophée. Maintenant, vu le bestiau, je me voyais mal trimbaler la tête de l’ours chez le chef du village. Dans mes pensées, j’avançai d’un coup sec la lame de mon sabre vers la nuque de l’animal, les hurlements de celui-ci s’intensifièrent avant s’atténuer jusqu’à ce que le silence règne dans la grotte, seul la résonance de la chute d'eau brisait le calme pesant de cette endroit humide. Dans le regard de l’animal, je pouvais presque percevoir de la reconnaissance. Je ne pouvais pas prendre sa tête avec moi, ce n'était pas dans mon caractère. Le corps sans vie de l'ours resterai au complet dans sa dernière demeure qui était devenue sa tombe. Qu'il repose-en paix.